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Le Scrutateur.

Blog destiné à commenter l'actualité, politique, économique, culturelle, sportive, etc, dans un esprit de critique philosophique, d'esprit chrétien et français.La collaboration des lecteurs est souhaitée, de même que la courtoisie, et l'esprit de tolérance.

Livre : Une somme sur Raymond Guilliod vient de paraître, par Edouard Boulogne.

 

Livre : Une somme sur Raymond Guilliod vient d'être publiée.






La mort de Raymond Guilliod est encore trop récente (novembre 2005) pour que l'on ait déjà commencé a oublier, cette personnalité remarquable, par sa sensibilité personnelle d'homme, épris aussi de poésie, et de peinture (qu'il pratiquait à ses heures), mais aussi pour sa participation à la vie sociale et politique de la Guadeloupe, durant près de quarante ans, avec un sens du dévouement au bien public (servir, plurôt que se servir), poussé jusqu'à l'abnégation. Mais c'est pour éviter l'inévitable érosion de la mémoire au fil des ans que sa fille Maryse, et ses amis nous offrent sur l'ancien député de la Guadeloupe, un livre de mémoire et de souvenirs, qui est aussi une Somme.

Né en 1919, d'origine populaire, doué, et dur au travail, Raymond Guilliod, fit d'excellentes études à St-Claude, en Guadeloupe (dont il était originaire) puis à Basse Terre, et Pointe-à-Pitre. La seconde guerre mondiale l'empêcha de poursuivre des études supérieures, et M. Guilliod entra dans l'enseignement comme on entre en religion, en qualité d'instituteur.

Très vite, il se fixa professionnellement dans la commune de Bouillante, sur la côte sous le vent, alors la commune la plus insalubre, et la plus pauvre de l'île. Il devait être directeur de l'école communale, avant de devenir, fortement incité par la population bouillantaise, le maire de la commune, puis le député (à partir de 1973) de la troisième circonscription de la Guadeloupe.

Quand, estimant avoir bien servi sa Guadeloupe en politique, R.Guilliod se démit de ses mandats électifs, il ne détela pas pour autant de la lutte civique, et s'engagea dans divers secteurs d'activité. La plus connu fut sa direction à la fois énergique et souple, selon sa méthode, de l'association Verte Vallée, destinée à mettre en valeur le patrimoine historique et culturel de la Guadeloupe et plus particulièrement de la côte sous le vent.

Raymond Guilliod ces dernières années, réalisa certains rêves anciens, et consacra ses loisirs à la navigation de plaisance ( “je fis l'acquisition d'un splendide spinnaker”) et au tourisme culturel. Il réalisa ainsi un voyage en Egypte et contempla, vieux rêve d'enfance et d'adolescence, les Pyramides sur le site de Giseh.

La maladie, celle qui ne pardonne pas, l'atteignit, et l'emporta très vite. Auparavant ses parents et amis l'avaient incité à écrire ses mémoires.

Il n'en avait plus la force. Et il dut se contenter de dicter ses souvenirs, que sa fille Maryse Preira-Guilliod, enregistra sur de nombreuses cassettes.

Raymond Guilliod mourut en novembre 2005.

Maryse Preira-Guilliod, s'attela au travail de la mise en forme des matériaux bruts laissés oralement par son père, en s'appuyant aussi sur les archives abondandes de l'ancien député maire.

Son travail constitue la première partie (une centaine de pages) du beau livre qui vient d'être mis en vente sous le titre “Toujours servir par amour”.

Raymond Guilliod, que j'ai connu et estimé, peut être fier. Sa fille a servi sa mémoire, avec fidélité et talent. Le ton est simple; le résumé de l'action politique, est rigoureux tout en étant parsemé d'anecdotes, souvent pittoresques et émouvantes.

Le reste de l'ouvrage comporte une étude de l'oeuvre proprement politique, notamment à Bouillante, de R. Guilliod, par l'historien bien connu Gérard Lafleur.

L'on parcourra avec intérêt un copieux album de photos, et les témoignages d'amis et collègues tant enseignants que politiques de R.Guilliod.

L'ouvre commune de Maryse Peira-Guilliod et de son père , qui constitue un livre de 256 pages, doit figurer dans les bibliothèques de tout Guadeloupéen, qui recherche dans le monde politique les personnalités, trop rares, qui concoivent la politique comme un service et un don de soi.

Je le dirai plus particulièrement pour les jeunes, en manque de repères dans un milieu, qui a trop tendance à se déliter.


Edouard Boulogne.


Comment se procurer l'ouvrage?


D'abord dans les librairies suivantes :

Encre Marine, à Basse Terre;


La Ramure, Au Moule. Point-Lire, au Moule.


Boutique de la presse, à Jarry.


La Boutique du livre (Millenis) Abymes.


On peut également se le procurer en contactant l'association Verte Vallée :


assvertevallee@wanadoo.fr

preira.maryse@wanadoo.fr

Tel : 0690 58 47 03,


Bonnes pages : (J'extrais du livre ces trois pages consacrées à la départementalisation. Elles ont précieuses en cette période trouble que connait la Guadeloupe. EB).




La départementalisation

La loi du 19 mars 1946 a érigé les quatre vieilles colonies (Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion) en départements. Certains, souvent aigris et toujours mécontents de leur sort, critiquent haut et fort cette départementalisation. Moi qui ai eu l'avantage de vivre à la fois sous le régime colonial et le régime départemental, je puis vous dire que sous le régime colonial nous n'avions pas les moyens d'aider la Guadeloupe à se développer. Prenons l'exemple de la paie de la quasi-totalité des fonctionnaires à l'époque coloniale. Les enseignants étaient rémunérés par le conseil général et celui-ci n'avait pas assez d'argent pour créer des postes. J'en ai pâti à mes débuts dans l'enseignement en 1941 ; j'ai eu mon CAP mais on ne pouvait pas me titulariser parce qu'il n'y avait pas de postes créés. Je gagnais très peu quand j'étais payé par la colonie, à peine de quoi survivre et quand il me fallait payer une pension, ma mère était obligée de me donner de l'argent. On ne me payait pas régulièrement, parfois avec trois mois de retard ! Que diraient aujourd'hui les enseignants si l'on nous ramenait à l'époque coloniale où les instituteurs suppléants n'étaient pas payés pendant les vacances ? Je me souviens qu'à l'approche des vacances scolaires, c'était le désespoir pour les enseignants suppléants car ils ne percevaient rien.

L'enseignement n'était pas le seul domaine à pâtir, évoquons aussi la santé qui relevait du conseil général, II n'y avait rien pour aider les gens malades, certains mouraient faute de soins. Quand j'étais jeune, j'avais pour voisins, M. et Mme Pierre Gauthierot et leurs quatre enfants, ils habitaient une petite case misérable. La mère s'est trouvée malade, puis un enfant, puis un autre. Ma mère et moi, nous nous occupions d'eux, prendre leur température, leur envoyer un petit bouillon, etc. Le père était maçon, il était au chômage et de plus buvait de l'alcool. C'était triste, mais lui, il n'est jamais tombé malade. Quand je me suis rendu compte de la situation, je me suis posé la question : « Qu'est-ce que je peux bien faire pour eux ? ». Je n'avais pas d'argent car c'était la période des vacances scolaires. Je suis donc allé voir le docteur Bertaud à Saint-Claude pour lui soumettre le problème. «J'ai pris leur température. Toute la famille est alitée et très malade sauf le père. Ma mère et moi, nous nous occupons d'eux mais ils n'ont pas d'argent pour vous faire venir ». Le docteur m'a dit qu'il n'avait pas besoin d'argent et qu'il leur rendrait visite. Maman et moi avons préparé la maison et des serviettes. Le médecin a diagnostiqué une typhoïde. Il est allé prévenir la mairie. Toute la famille a été emmenée en ambulance à l'hôpital. La mère et le fils aîné s'en sont tirés, mais quelques jours plus tard, j'allais à l'enterrement de trois enfants. Cela ne se produirait jamais maintenant et c'est là toute la différence avec le régime colonial. Le régime départemental est incomparable, surtout du point de vue de l'enseignement et de la santé. Quand nous sommes devenus département en 1946, on a demandé à toutes les communes combien de classes il leur fallait. Les crédits pour la création de postes ont été tout de suite débloqués. Dans les communes, il n'y avait pas les salles de classes pour accueillir les écoliers. « 1es crédits sont là, combien de classes vous faut-il ? ». Outre les bâtiments, les enseignants étaient en nombre insuffisant et c'est là que l'on a dû faire venir des instituteurs de l'hexagone.

Aussitôt devenu département, des routes ont été construites. Tout cela grâce à la départementalisation et j'entends encore des gens dire qu'ils ne sont pas contents !... C'est à n'y rien comprendre ! Avec cette nouvelle donne est venue l'heure de l'égalité de droits et de devoirs. Certains étaient bien contents de bénéficier de droits sans devoir quoi que ce soit en retour. Moi, je leur disais : « Si vous réclamez l'égalité des droits, il faut aussi accepter celle des devoirs ».

Comment expliquer les courants indépendantistes malgré tout ? Dès la fin de la Deuxième guerre mondiale, des étudiants guadeloupéens sont allés en France hexagonale, ils étaient accueillis et embrigadés par les militants communistes très puissants. Pendant la guerre froide entre l'Union soviétique et le clan de l'Ouest, la propagande communiste se diffusait largement grâce à ces jeunes que l'on envoyait faire des stages dans les pays de l'Est et même en Union soviétique. Quand ils revenaient ici, ils accordaient une trop grande importance aux commérages de tous bords. Quand les Russes sont venus massacrer les Hongrois en quête de liberté en 1956, on leur a dit que c'était la CIA qui avait mis le désordre et les Russes étaient intervenus. Lors du printemps de Prague, il en a été de même. Quand ils sont entrés en Afghanistan pour mettre de l'ordre mais surtout parce qu'ils voulaient mettre la main sur l'Afghanistan, les Russes prétendaient être contre le colonialisme. Ils disaient aux étudiants guadeloupéens qu'ils étaient colonisés alors que le pays qui avait le plus grand empire colonial à l'époque c'était bel et bien l'Union soviétique qui comprenait tous les pays qui ont été libérés depuis la chute du mur de Berlin en 1989. (…..).


Raymond Guilliod. pp 83 à 85),

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A
J'ai été l'attaché parlementaire du député Raymond Guilliod en 1980-1981. Cet homme n'a jamais eu un mot de plus que l'autre. Il était profondément attaché à une Guadeloupe française et voulait le faire savoir, mais toujours avec la gentillesse qui le caractérisait. Il n'a pas mérité d'être victime de la vague rose de 1981. Il me parlait de Bouillante, dont il était le maire à l'époque, avec un sens élevé du dévouement à ses administrés et compatriotes qui forçait le respect. Merci du fond du coeur, Raymond, d'avoir renforcé en mon coeur cet amour pour la Guadeloupe que vous saviez transmettre avec tant de simplicité. Et de m'avoir rappelé dans  l'île pour la servir à vos côtés. Mais cette période fut courte. Trop courte....Arnaud Souquet-Basiège.
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J
Je m'étais déjà fait l'écho du travail remarquable de la fille de Raymond GUILLIOD découvert à l'occasion d'une brillante conférence donnée le 3 octobre 2008. L'ouvrage est effectivement à mettre entre toutes les mains. J'ai eut la chance de dialoguer avec ce grand homme et j'ai toujours été ému par sa bonté.Jean-Claude HALLEYhttp://halleyjc.blog.lemonde.fr/2008/09/30/vendredi-3-10-2008-tout-sur-raymond-guilliod/
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